vendredi 12 décembre 2008

Tola Vologe

Je daube souvent "L'Equipe", force est de constater que cette semaine, la série sur Lyon est une réussite. Un article signé Duluc (pas Chevally, c'est bizarre) fait honneur à un journal pour lequel, ca n'est pas du luxe !

LE JOUR OÙ...
Tola Vologe a été arrêté
SON NOM EST PLUS FAMILIER que son histoire : chaque jour, les footballeurs lyonnais s’entraînent sur le complexe Tola-Vologe. Mais qui était « Tola » Vologe ? Anatole Vologe, né le 25 mai 1909 en Russie, d’une mère qui s’appelait Strogoff, comme dans les romans d’aventures, avait participé avec l’équipe de France de hockey sur gazon aux Jeux Olympiques de Berlin, en 1936, et avait été international dans trois disciplines : hockey sur gazon, relais 4 × 400 m en athlétisme, double en tennis de table !
Il avait appris le hockey sur gazon dans un collège britannique et, trente-deux fois international, faisait équipe avec Félix Grimonprez, tombé à Calais en 1940 et qui donna son nom à l’ancien stade de Lille. Trois fois champion de France du 4 × 400 m avec le Stade Français, il avait quitté Paris pour s’installer à Lyon, en zone libre, en juin 1940.
Il était alors devenu un animateur formidable du sport lyonnais, réveillant l’équipe de hockey du LOU, s’occupant de l’organisation du vieux Challenge Ayçaguer de cross. Marcel Rivière, un grand reporter du Progrès, disait qu’il était « grande gueule et grand cœur ». Puis la zone libre ne l’était pas restée et Tola Vologe avait rejoint le réseau de résistance Sport libre.
Détenu au fort de Montluc
Le 24 mai 1944, deux jours après avoir organisé un meeting d’athlétisme au stade des Iris, à Villeurbanne, Tola Vologe est arrêté en plein cœur de Lyon, rue Bellecordière, au bar le Monde. Les plaques d’immatriculation de la Traction des hommes venus l’arrêter, relevées par des témoins, permettent de remonter le fil : ce sont des miliciens. Puis ses proches apprennent qu’il est détenu au fort de Montluc. Dans un livre sur les champions lyonnais (*), Gilles Malfondet révèle, après avoir recueilli les témoignages d’anciens résistants, que l’un de ses geôliers l’avait reconnu : il était, avant guerre, le capitaine de l’équipe d’Allemagne de hockey sur gazon.
Le 28 mai, quatre jours après son arrestation, Vologe est emmené avec deux autres prisonniers, Wolf et Weissman, sur le chantier de déblaiement de l’école de santé militaire qui a été bombardée, avenue Berthelot. Il a le maillot du LOU sur lui. Ce jour-là, un autre athlète du club lyonnais voit un corps sans vie portant le maillot du LOU chargé dans un camion devant l’école de santé : Vologe a été abattu avec ses deux camarades par un sous-officier allemand qui le maltraitait depuis trois jours, au prétexte d’une tentative d’évasion.
Le 10 juin, il est porté en terre au cimetière de la Croix-Rousse, en présence de la Gestapo. Ses cendres seront transportées le 3 juin 1976 au cimetière de la Doua, en présence de ses anciens coéquipiers du LOU. Dans L’Équipe du 23 septembre 1946, on peut lire cet hommage de Loys Van Lee, futur grand nom de l’ORTF, qui avait croisé pour la première fois Tola Vologe en 1927, à Creil : « Tola est mort. Il y a autour de ce fait le silence qui suit les grandes choses, comme un réveil dans la nuit. » – V. D.
(*) Tout près des étoiles, Lyonnais fleurons du sport français, Association des amis du sport lyonnais, 29,90 euros. Préface de Patrick Chêne.

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